Antonio Rosmini
Expérience et
Témoignage
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par Marie-Catherine BergeyTrigeaud
Les fondations, personne ne peut en poser
d'autres que celles qui existent déjà : ces fondations, c'est Jésus-Christ.
N'oubliez pas que vous êtes le temple de Dieu, et que l'Esprit de
Dieu habite en vous. Si quelqu'un détruit le temple de Dieu, Dieu le détruira,
car le temple de Dieu est sacré, et ce temple, c'est vous.
I Co 3, 11, 16 - 17
L'humanité est éminemment religieuse
Il n'est pas dans notre intention d'aborder
ici une question aussi vaste et aussi complexe, mais il faut évoquer brièvement
ce que l'on entend par spiritualité, et plus spécifiquement, par spiritualité
catholique, et rappeler à partir de quand et de qui celle-ci a vu le jour et
s'est développée sous cette appellation. Si l'usage du mot est tardif[1],
la spiritualité s'est pourtant exprimée dès les premiers temps de l'humanité
pour désigner, selon les modes évolutifs liés aux cultures et au temps, cette
activité pensante de l'homme qui réfléchit sur le sens de son existence et sur
sa destinée. Avec pour conséquence l'inquiétude douloureuse face à ce qu'il ne
comprend ni du monde, ni, surtout, de lui-même[2].
Ce désarroi le porte alors à s'interroger sur le rapport entre le visible et
l'invisible, invisible à visages multiples dont émerge peu à peu un visage
unique qui portera le nom de Dieu[3],
un Dieu qu'il ne peut parvenir à voir de ses yeux d'homme, mais dont il
distingue pourtant la trace dans le monde et, mystérieusement et parfois, avec
force, dans lui-même. L'homme en vient à formuler l'hypothèse de l'existence
d'un lien possible entre lui-même et ce Dieu caché et à témoigner, dès qu'il le
peut, d'une expérience d'un type particulier, l'approche de cet Invisible.
"L'humanité est éminemment religieuse", nous reprendrons l'expression
de P. Shebesta [4],
à propos du sens religieux de l'homme primitif, et, même s'il fait l'objet
d'une controverse, le terme " religieux" exprime bien la notion de
lien. Mais c'est l'Ancien Testament qui révèle la lente émergence, au sein de
la conscience individuelle et collective, de la conviction que les deux tenants
de ce lien, Dieu et l'homme, sont engagés dans une relation de personne à
personne, relation difficile dont l'expression la plus achevée est peut-être
celle de Job, au plus profond de sa détresse, implorant son Créateur dont il ne
comprend pas les desseins. En réponse à l'interrogation de Job, la conscience
humaine va s'éclairer pleinement avec la Révélation du Dieu incarné, Jésus
Christ venu accomplir les promesses des prophètes bibliques ; et elle va faire
comprendre que si l'homme cherchait désespérément Dieu, Celui-ci est venu en
personne à sa rencontre, rencontre aux effets infinis et qui s'est établie dans
l'histoire pour se prolonger dans les profondeurs de l'homme, de tous les
hommes, sans distinction. De cette relation nouvelle, parce qu'informée par le
Fils de Dieu lui-même, Paul de Tarse, qui, pourtant, n'a jamais vu le Christ de
son vivant à la différence des apôtres, spectateurs directs de la Révélation
messianique, Paul de Tarse donc se fait témoin et nous livre ainsi, en un récit
intense dans lequel il n'hésite pas à dévoiler sa propre intimité, cette
expérience d'un nouveau type, puisque, désormais, la relation à Dieu passe par
son Fils : telles sont les lettres aux Romains, aux Corinthiens, aux Éphésiens…
Ces textes à la fois inspirés et réalistes proposent au monde naissant de la
chrétienté les prémices des grands thèmes de la spiritualité chrétienne, thèmes que
l'on retrouvera depuis dans les écrits de tous ceux qui ont partagé la même
aventure, avec les constantes et les variantes propres à chacun du commerce
intime avec Dieu.
Ce
commerce, que l'homme a distendu, fragilisant le lien existentiel avec Dieu, et
cela, non seulement au cours de l'histoire collective mais, surtout, dans le
cours de son existence propre, il appartient alors à celui qui en manifeste le
désir de le restaurer dans cette nouvelle perspective. C'est un long et
difficile travail dans les profondeurs de soi-même, qui nécessite un
apprentissage selon des modalités dont Dieu seul est le maître mais dont les pédagogues
en ce monde seront ces grands spirituels qui, à la suite de Paul, nous ont
devancés ou nous accompagnent encore aujourd'hui sur une telle voie. Cette
démarche en appelle à la plus haute activité de l'homme au moyen de son
principe pensant, par son esprit, dont Dieu a pourvu chacun en son existence et
qu'il s'agit de mettre en mouvement.
Et c'est donc à cette activité d'un genre
particulier, c'est à sa nature, aux conditions de sa mise en œuvre et à ses
conséquences, que les lettres pauliniennes initient alors l'homme et l'Église,
exposant, en clair, ce qu'est cette même activité, et, ce qui est tout aussi
important, ce qu'elle n'est pas.
Le chemin de Damas
Tout a commencé sur un chemin, et la scène est
hautement symbolique en ce qu'il figure, par ce qui va s'y passer, la voie
intérieure de l'être. Paul, en marche vers une mission sinistre, s'effondre,
terrassé et aveuglé par une apparition, qui n'est autre que Jésus ressuscité.
Ainsi éprouvé par la violence d'une épreuve qui dura symboliquement trois
jours, il rentre humblement en lui-même, et découvre une autre réalité, celle
de sa propre conscience où Dieu l'attendait depuis toujours et lui parle. Cette
épreuve provoque une métamorphose[5],
qui le conduit à renoncer à sa destination première dont il connaît à présent
qu'elle le menait à sa perte tout autant qu'à la perte d'autrui, et, recouvrant
la vue, à prendre une autre direction[6].
C'est de cet itinéraire dont il va être question dans ses écrits ; c'est, on le
sait, les premiers pas de l'Église, mais aussi, ce qui nous intéresse ici, le
récit d'une expérience nouvelle, les mouvements intérieurs d'un homme qui
s'interroge sur ce Dieu venu ainsi à sa rencontre, comme Il est venu à la
rencontre de tous les hommes, et sur la transformation intérieure que provoque
cet événement fulgurant avec toutes ses conséquences sur son existence. Mais
Paul ne livre pas de façon impudique son intimité. Sans complaisance envers
lui-même, et comprenant qu'est bien là sa nouvelle mission, il se met à nu sans
autre but que de nous faire profiter de
l'éducation qu'il a ainsi reçue de son divin Maître. D'initié, il devient
initiateur, et cette opération, si elle part du plus profond de lui-même, se
poursuit à la lumière du monde, hors de tout secret, comme le rappelle si
souvent le Christ pour qui nous ne sommes pas des serviteurs, mais des amis à
qui Il ne veut rien cacher "car, dit-Il Lui-même, rien n'est caché, sinon
pour être manifesté, rien n'a été gardé, sinon pour venir au grand jour"
(Mc, 4, 21). Nous sommes loin ici d'un rite occulte réservé à quelques-uns uns
seulement. Paul se fait donc "pédagogue spirituel"[7],
mais à la face du monde et pour le monde, de cette mission initiée par le
Christ lui-même qui ne faisait acception de personne, au grand scandale de son
entourage. C'est sans doute la naissance de la spiritualité catholique, mais il
s'agit à présent de comprendre l'enjeu du choix de cette expression.
L'esprit selon Paul
La spiritualité vise
l'activité réflexive de l'esprit, celle qui met en jeu nos dispositions
intellectuelles pour tenter de comprendre en vérité l'essence des choses, et
qui, du visible, conduit à l'invisible. Les philosophes antiques, et, surtout,
Platon, ont mis en lumière l'exercice de cette activité, de façon dialectique,
en insistant sur ce qu'elle n'est pas.[8]
Or jusque là, les religions, y compris celle de l'Ancien Testament, s'étaient
attachées à proposer à l'homme une explication du monde, inspirée, certes, mais
ne laissant guère de place à cette activité libre de l'esprit telle que
l'entend Platon. Sans nul doute parce que l'homme n'était pas prêt à cette
démarche. Non que l'homme ancien n'en fut capable. L'esprit n'a pas d'âge. Il
suffit de contempler l'art sacré des dits primitifs pour comprendre à quel
point l'expression humaine fait preuve d'intuition et de dépassement. C'est
d'ailleurs sur cette évidence que repose la mystique de tous les temps. Mais
cette intuition provoque le travail de l'esprit, avec des conséquences dans
l'histoire de l'être propre comme dans l'histoire de l'humanité. Avec des
"étapes" de conscience, comme celle qui nous intéresse ici, le mot
"étape" ne renvoyant pas nécessairement au vieux rationalisme de
Brunschwicg. Et, précisément, le terme essentiel sur lequel repose l'appareil fondamental
de l'enseignement paulinien, et qui en fait, non sans risque, sa nouveauté, est
le mot "esprit"[9],
que Paul emploie de trois façons : esprit de l'homme, Esprit de Dieu, Saint
Esprit. Un même mot pour trois acceptions différentes, et qui par conséquent,
unifie et différencie à la fois la signification, voici l'originalité et la
nouveauté du message paulinien, et donc, sa force, qui va marquer de façon
définitive les développements de la spiritualité occidentale ; mais qui, à
première vue, oblige à se demander comment Paul s'y prend-il pour résoudre la
contradiction qu'il suscite entre la Révélation de l'Ancien Testament et la vie
de l'esprit qui a ses exigences, comme cette liberté qui la justifie.
Qu'entend alors Paul
par "esprit" et quelle est la portée de ce terme emprunté à la fois à
la tradition biblique et à la littérature gnostique et qui, du reste, donna
lieu par la suite aux diverses querelles interprétatives assorties des ruptures
que l'on sait?
L'Ancien Testament qui s'était chargé d'éduquer le peuple de Dieu
afin de le préparer à ce qui allait suivre, avait posé le respect de la Loi
comme règle de vie. Mais Paul, s'appuyant sur les paroles du Christ, instruit
alors une nouvelle Loi, qui est celle
non de la lettre, qui contraint, mais celle de l'esprit[10], qui ouvre un
espace de liberté comme unique condition sine qua non pour retrouver un
chemin perdu depuis la faute adamique. Non que l'A. T. ne témoigne pas du
travail du l'Esprit de Dieu dans l'esprit de l'homme, comme chez Abraham, David
ou Moïse. Car ce travail est certainement à l'origine de la création. Mais
ici, Paul se situe dans la nouvelle ère de l'Incarnation et en conséquence,
"affirme une théologie christique"[11]
comme moyen de franchir une nouvelle étape dans l'éveil de cet esprit.
Il faut préciser alors ce qu'est l'homme spirituel selon Paul :
il est « l’homme intérieur »
(Rm, 7, 22) ce dont, avant tout, l'homme doit prendre conscience, car "qui
donc entre les hommes sait ce qui concerne l'homme, sinon l'esprit de l'homme
qui est en lui…" (I CO, 2, 11), de même que "nul ne connaît Dieu,
sinon l'esprit de Dieu" (idem 12).
Paul utilise l'expression grecque pneuma, litt. souffle de vie,
cela pour désigner ce lieu intime à l'homme sans lequel celui-ci n'est que
matière sans expression, vouée à la destruction, qui traduit le mot rhua de
l'A T, ce souffle qui a fonction vitale et qui est à la fois intrinsèque et
extrinsèque à l'homme, et qui l'a
animé. Ce pneuma confère à l'homme son essence même, et lui est propre.
C'est ainsi que, avec Paul, nous pénétrons dans la région la plus profonde de
l'homme mais, pourtant, c'est dans cet
espace mystérieux que l'homme va devoir s'aventurer. Et faire des découvertes.
Car Paul déclare alors que c'est là que Dieu a placé son esprit, cet Esprit de
Dieu (I Co, 2, 1-16, et 3, 1-4) qu’il convient de retrouver et de reconnaître
(Rm, 8, 14-15), à la suite de cet événement particulier qu'est une "une
révélation intérieure"[12].
Et Paul de s'exclamer pour mieux faire comprendre : "Ne savez-vous pas que
vous êtes un temple de Dieu, et que l'Esprit de Dieu habite en vous?" (I
Co, 3, 16)". Il relie ainsi, dans un même mot, l'activité pensante de
l'homme, qui est la fine pointe de son existence, à l'existence même du
principe divin.
Pour préciser le sens de son affirmation,
Paul, qui ne se perd cependant pas en définitions[13], oppose l’homme charnel et psychique à l’homme
spirituel (I Co, 2, 6-9, 14-16), distinction dans laquelle on reconnaîtra le
dualisme platonicien. Toujours selon Paul, l'homme spirituel doit s'affranchir
de l'esclavage de la chair afin de croître en liberté et en accomplissement (Rm, 8, 14-15).
Que signifie donc Paul par esclavage?
Rien d'autre que le refus d’admettre la réalité de cet Esprit en nous, refus
que Paul impute à l'esprit charnel, qu'il entend comme force contraire à
l'épanouissement de notre esprit. La conséquence en est la division d'avec
Dieu, le pourvoyeur de cet Esprit, division qui nous trompe sur l'existence, la
nôtre et celle du monde, et qui a pour effet de nous conduire à la mort de
notre esprit. C'est le risque encouru par l’homme depuis la faute adamique,
laquelle n'a pas seulement une signification chronologique, mais concerne
l'histoire propre de chaque être, faute dont nous a délivrés Jésus Christ par
le sacrifice de sa vie et par sa résurrection. Cependant, cette délivrance est
une promesse et une espérance (Rm, 8, 24), et non une chose acquise une fois
pour toute. Le rôle de l'homme va consister alors à effectuer un travail au
sein de son esprit, afin de le purifier de tout ce qui l'encombre, de retrouver
sa puissance, et de s'offrir tout entier aux divins enseignements. Le moment où
l'homme prend conscience de la nécessité de ce travail peut résulter autant
d'une lente émergence venant du fond de sa conscience, de l'éveil progressif dû
à l'éducation, comme d'un choc dû à une brusque intervention divine, qui opère
une captation violente du type de celle éprouvée par Paul sur le chemin de
Damas. Mais conscient de la gravité d'un événement qui se situe en ce lieu
intangible et par conséquent, inviolable, du plus profond de l'homme, Paul
prend soin de rappeler que celui-ci peut refuser cette démarche : "Tout
m'est permis", même si "tout ne m'est pas profitable (1 Co, 6, 12).
Et Paul tente de rassurer : "Ce n'est pas un esprit de peur que Dieu nous
a donné, mais un esprit de force, d'amour et de raison" (2 Tm, 1, 8).
Mais n'y a t-il pas
là un paradoxe : comment véritablement
parler de libération de l'esprit alors que celui-ci est capté, alors que cet
esprit qui prend conscience de sa puissance se voit envahi par cet autre Esprit
auquel désormais il ne peut résister? Nous voici donc en face de la
contradiction bien connue entre liberté de l'esprit et Révélation, qui, du
reste, se retrouve aussi dans les autres religions du Livre. C'est une problématique
qu'il va être difficile d'évacuer, et qui provoquera de douloureuses fractures
au sein même de l'Église, et il fallut des siècles pour que l'on comprenne, si
tant est qu'on l'ait vraiment compris, combien est essentielle la cohabitation
fructueuse de la vie de l'esprit et de la foi. C'est ici que la spiritualité
paulinienne ouvre une voie en ce sens, et Paul ne résiste pas à proposer ce
qu'il estime, par expérience, devoir constituer les moyens nécessaires à cette
cohabitation audacieuse, audacieuse pour lui, comme pour tous ceux qui voudront
emprunter la même voie.
Principes de la
spiritualité paulinienne
Il faut donc
rappeler que Paul est un lettré platonicien[14],
ce qui explique qu'il accorde une telle importance à la vie de l'esprit. C'est
donc tout naturellement qu'il en en fait un moyen essentiel dans ce qu'il est
convenu d'appeler l'économie du salut. Il part de la démarche spéculative
gnostique, qui consiste à purifier sa conscience de tout élément sensible
exclusivement rationnel capable de dénaturer jusqu'à l'aveuglement la vision du
principe dont cet élément est l'ombre dans le fond de la caverne intérieure de
l'homme, ce qui est le sens de l'expression "chair", et qui place
donc Platon à la racine de la spiritualité paulinienne. Paul pourtant n'exclut
pas le monde sensible et rationnel, nous y reviendrons, il dénonce seulement
les manœuvres dolosives de notre esprit qui se refuse à la remise en cause
réflexive.
Tout ceci ne va pas
de soi, et prend l'allure d'un combat qui nécessite une vigilance continuelle,
une prudence constante : "N'éteignez pas l'Esprit, …. ; mais vérifiez tout
: ce qui est bon, retenez-le". Il faut donc discerner ce qui est bon de ce
qui ne l'est pas : les erreurs qui vicient notre raison comme les forces contraires
pour tromper l'homme sont incommensurables. C'est que, par paresse, l'esprit se
contente volontiers du monde facile des apparences convenues de la
"chair", ces illusions trompeuses de l'opinion que lui rapporte,
involontairement ou non, sa conscience, jusqu'au danger de l'irréversibilité
fatale car, comme le dit si bien R. Gélibert[15]
: "Tant que dure l'illusion de la connaissance, la connaissance ne peut
évidemment apparaître." Il est donc nécessaire d'accomplir ce que les platoniciens appelaient la
conversion de l'opinion à la pensée[16],
et que Paul traduit ainsi : " Ce n'est pas contre des adversaires de chair
et de sang que nous avons à lutter mais contre les puissances du mal pour
lesquelles il faut endosser l'armure de Dieu."… "Tenez-vous donc
debout, avec la Vérité pour ceinture, la Justice pour cuirasse, et pour
chaussure le Zèle à propager l'Évangile de la paix; ayez toujours en main le
bouclier de la Foi, grâce auquel vous pourrez éteindre tous les traits
enflammés du Mauvais enfin, recevez le casque du salut et le glaive de
l'Esprit, c'est-à-dire la parole de Dieu" (Ep, 6, 14-17). C'est une lutte
difficile qui passe même par le doute, il est un lieu commun de dire que tous
les spirituels en témoignent, Rosmini lui-même évoquera souvent les "morsures
douloureuses de la conscience".
Nous retrouverons
ici, comme dans toute l'histoire de la spiritualité, orientale et occidentale,
la même exigence impérieuse de cette purification de l'esprit indispensable à
la pensée, c'est une invariance rassurante, en somme, sur la nature spirituelle
de l'homme. Elle suppose un mouvement de retour réfléchi et critique à partir
de l'expérience des données purement senties ou d'interprétations rationnelle
set logiques. L'esprit pensant va intuitivement, c'est-à-dire directement, au principe
des choses.
Mais il ne faut pas
s'y tromper, et c'est ici que Paul se sépare de Platon, il ne s'agit pas d'un
libre exercice de construction conceptuelle, la démarche n'est pas purement
cognitive et abstraite, ce qui nous amènerait de la croyance à la pensée
épurée, que sa nature, d'ailleurs, rendrait inaccessible. Nous ne nous plaçons
ici ni dans le savoir, ni dans l'avoir, mais dans l'être : Paul a bien mis en
lien l'esprit de l'homme et l'esprit de Dieu, d'un Dieu qui porte le nom,
rappelons-le, à la signification si parfaitement symbolique : Yahvé, en
quelque sorte : "Je suis celui qui est l'Existence-même", dont,
événement capital, Jésus est
l'incarnation vivante parmi nous. Et c'est ainsi que ce travail de la
conscience dont nous venons de parler et qui a consisté à vider notre esprit de
ses entraves va dès lors consister à le remplir de ce Dieu "qui est",
dont l'effet sera de nous ouvrir à l'existence dont Il est le principe, comme
la Révélation nous l'apprend : existence de Dieu, existence de nous-même, notre
conscience s'éveille alors à cette révélation, à des degrés différents selon
nos aptitudes, sans oublier toutefois qu'il s'agit uniquement d'une approche,
et non d'une fusion, en raison des limites constitutives de la condition humaine
L'homme bénéficiera donc d'une transformation
qui le disposera désormais à la rencontre avec son Dieu. Car il n'y a pas
d’intériorité sans transcendance[17],
mais la transcendance est un Être qui ne dénature pas l'être qui l'accueille ;
bien au contraire, elle lui permet de retrouver son authentique condition
d'homme. L'homme alors peut recevoir la "correction du Seigneur" (He,
11, 5-13), ce qui n'est autre que l'éducation de Dieu, le père de notre esprit
(idem). Cet apprentissage le nantit d'une arme efficace, le critère de
vérité et de justice qu'évoquait Paul et qui est l'apanage divin ; c'est ce que
révèle à l'homme ce retour en soi-même propice au dialogue intime avec Dieu,
dialogue enrichi par les nourritures spirituelles. Son esprit retrouve ainsi sa
vitalité qui lui permet dès lors de porter un regard plus authentique et plus
aimant sur toute réalité qui s'offre à lui : "Puisque l'Esprit est notre
vie, que l'Esprit nous fasse agir" (Ga, 5, 25). L'homme ainsi restauré
peut alors regarder le monde et s'engager à le reconstruire.
Car, et c'est une
autre clef l'essentiel de l'enseignement de
Paul, la relation de l’homme à Dieu implique la relation au monde.
L'être est dans le monde, et il faut en assumer cette dimension incontournable.
En effet, notre esprit est incarné, à l'image de la divine Incarnation que nous
contemplons dans le mystère de la Nativité. Tout comme le modèle trinitaire en
est le symbole parfaitement accompli, l’homme ne peut faire abstraction de Dieu
ni de lui-même,, pas plus que de ce monde extérieur qui frappe à sa conscience
réflexive, sans quoi serait stérile toute recherche intérieure. Mais ce n'est
qu'après ce travail sur soi-même et après la restauration de ce lien privilégié
et personnel avec le Créateur, que l'homme peut retrouver le monde et
l'accueillir, en vérité et en justice, selon cette vérité et cette justice de
Dieu révélée par le Christ. "En vérité, je vous le dis", répète le
Christ infiniment, ce qui est loin d'être une formule oratoire, mais le rappel
d'un principe fondamental. Le Christ parle en vérité, et c'est bien en vérité
et en justice que s'engage le travail de l'esprit sous le regard de Dieu, qui
est lui-même la Vérité absolue. Ce qui ne peut se faire sans amour : l'on ne peut connaître sans aimer, sans
aimer cette vérité qui illumine notre esprit et qui transfigure notre regard
sur nous-mêmes comme sur les autres, en l'existence même.
Théologie
christique et charité
Car le Christ nous
le recommande et l’a vécu jusqu’à donner sa vie : « Tu aimeras ton prochain
comme toi-même ». Paul insiste : « la Charité est la Loi dans sa
plénitude » (Rm, 13, 10), L'on ne
peut donc accomplir cette démarche intérieure sans Amour qui nous projette dans
le monde, ce que Paul répète inlassablement : "Quand je parlerais plusieurs
langues…. Quand j'aurais le don de prophétie… " et, même, "quand
j'aurais la plénitude de la foi, une foi à transporter les montagnes, si je
n'ai pas la charité, je n'ai rien" I, Co, 13, 1-3). Et Paul définit en une
formule percutante ce qu'est cette charité à laquelle il exhorte ( I Co, 13,
4-12), et qui résume l'essentiel de l'attitude du croyant : "Maintenant
donc, demeurent foi, espérance et charité, ces trois choses, mais la plus
grande d'entre elles, c'est la charité" (I Co, 13).
La charité, c'est le
mode opératoire de l'amour, qui rend effectif ce que l'esprit a conquis, et
sans charité, le travail accompli en notre esprit est inutile, nos dons
spirituels ne servent à rien. Paul, n'hésitant pas à se faire plus concret,
engage à aimer les plus faibles, les désordonnés, les craintifs, à faire preuve
de douceur, à ne jamais rendre le mal pour le mal, mais à toujours rendre le
bien envers tout un chacun (1 Th, 5, 14615), à demeurer lent à la colère, à ne
pas oublier l'hospitalité, à se souvenir des prisonniers, à" persévérer
dans la dilection fraternelle"(He, 13, 1). Aimer, donc, en justice et en
vérité, de la justice illuminée par la foi, et de la vérité de cette sagesse
qui est "folie pour le monde" (I Co, 1, 17-30). Et le modèle parfait
qui incarne cet amour sans lequel la spiritualité demeure un froid exercice de
l'esprit est le Christ, qui aima la condition humaine jusqu'au sacrifice ultime
de sa vie.
Ajoutons enfin que
Paul n'oublie pas le corps qui porte l'esprit. Soucieux de mettre en garde
contre les dérives capables de dénaturer la démarche spirituelle, il n'hésite
pas à dénoncer cette mutilation de l’homme qui le pousserait à négliger
l’enveloppe charnelle qui lui est propre. Paul vise ici la coupure pathologique
de la conscience avec le monde sensible, dont le corps est l'organe
essentiel. Car le corps est « temple de l’esprit », et en tant
que tel doit être assumé dans la totalité de l’existence, en lui accordant sa
place dans la recherche du salut : c'est l’unité du corps et de l’esprit, l’un
étant ordonné au service et à l’accomplissement de l’autre. Car, "ne
savez-vous pas que vos corps sont les membres du Christ" (I Co, 6, 15).
La souffrance
Mais il est un effet
inéluctable de cette expérience impossible à sous-estimer, et que Paul évoque
souvent, comme faisant partie de son quotidien : c'est la souffrance. Elle a
plusieurs causes. Nous avons choisi Job comme le personnage incarnant
symboliquement l'angoisse de l'homme qui se sent abandonné par son Créateur.
D'autres personnages bibliques ont eu aussi à éprouver la solitude de l'âme,
qui s'effondre sous le poids de ses doutes et de ses incertitudes. Paul
témoigne à son tour de ces moments où l'esprit, même parvenu à la fine pointe
de ses facultés, est la proie d'un vertige devant cet infini qui se dérobe sans
cesse. Car il n'est pas donné à l'homme d'atteindre ici-bas cet Absolu dont il
a la nostalgie. "O abîme de la
richesse, de la sagesse, de la science de dieu! Que ses décrets sont insondables
et ses voies incompréhensibles" s'écrit-il douloureusement dans sa lettre
aux Romains (11, 33). Alors, il faut bien admettre que ce travail si pénible
destiné pourtant à nous libérer, nous plonge dans l'amertume de notre finitude.
A cette souffrance, d'autant plus vive que notre soif d'absolu est grande,
s'ajoute celle de notre charité devant la souffrance du monde, qui est celle de
nos frères : notre esprit transformé rend plus aiguë encore notre regard.
Enfin, nous avons évoqué plus haut cette souffrance liée à nos luttes internes.
L'image la plus éloquemment symbolique en est la croix christique, qui exprime
la contradiction de la réalité
horizontale de l'homme charnel
associée à la verticalité des aspirations de l'homme spirituel. Et le
Christ par sa souffrance sur la croix, n'est pas resté insensible à notre
écartèlement. Par cette incarnation, par cette mort, et, enfin, par cette
résurrection, Il s'est donné à nous.
Les dons de Dieu
De ses dons, l'homme
ne peut en connaître la mesure, car Dieu est
"Celui dont la puissance agissant en nous est capable de faire bien
au-delà, infiniment au-delà de tout ce que nous pouvons demander ou
concevoir" (Ep, 3, 20). C'est ainsi que "vous recevrez la force de
comprendre, avec tous les saints, ce qu'est la Largeur, la Longueur, la Hauteur
et la Profondeur, vous connaîtrez l'amour du Christ, qui surpasse toute
connaissance, et vous entrerez dans toute la Plénitude de Dieu" (Ep, 3,
18-19). Et c'est sur cette image intense que Paul achève ses lettres, avant de
s'avancer vers son martyr : "notre Dieu est un feu consumant" (He,
12, 29).
******
Tel est donc le
premier témoignage aussi étonnamment personnel de celui qui, se plaçant à la
suite du Christ, nous engage à emprunter la voie difficile du changement
intérieur, permettant la restauration de notre lien à Dieu, et la
transformation de notre rapport à nous-même et au monde. Et telles sont les
conditions qui mettent l’homme en état de trouver Dieu, ce que confirment tous
les grands spirituels, et, dans leur ligne, Rosmini, avec son originalité
propre.
Dès lors, la
spiritualité catholique occidentale eut le développement que l'on sait, avec
des mouvements spécifiques et les variantes qui caractérisent la diversité de
l'esprit humain. Très vite se constituèrent deux courants de la spiritualité
occidentale qui culminèrent à l'époque médiévale, l'un dit spéculatif[18],
produit de la mystique rhénane à la suite de Maître Eckhart, et l'autre, contemplatif,
à la suite des mystiques espagnols, Jean de la Croix, Thérèse d'Avila. Rosmini,
singulièrement mais, surtout, avec audace, embrassera les deux, sans doute
parce que lui-même les vécut pleinement dès sa naissance : pratiquant la voie la plus directe de la
quête de l'absolu, tout en adoptant, de façon complémentaire, celle qui met en
œuvre la recherche spéculative la plus rigoureuse d'un esprit à la fois
scientifique et visionnaire. D'où l'immense richesse de son œuvre écrite,
nourrie de l'expérience religieuse et
éprouvée par les actes les plus héroïques comme les plus humbles d'une vie tout
entièrement disposée à offrir à son prochain ce que son esprit pouvait
comprendre de toute vérité existentielle qu'il accueillait sans réserve.
Rosmini n'aura de cesse, tel un paysan dans son champ qui ôte toute pierre
capable d'entraver ses cultures, de mettre en coupe ce que son esprit pouvait
offrir à sa vive intelligence, laissant opérer en lui ce principe spirituel
qui, après une ascèse disciplinant à la fois ses forces sensibles et
intellectuelles, permet de régénérer
l'esprit, qui peut alors contempler ce que l'homme peut atteindre, dans le
respect de sa limite existentielle, ce qui peut lui être donné de la Vérité et
de ce Dieu qui en est l'auteur.
Et c’est le sens de ces mots légués avant de mourir à Manzoni, comme
l'aboutissement suprême d'un esprit accompli : " adorare, tacere,
godere".
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Marie-Catherine Bergey Trigeaud, 25 01 2012
© Centre français de
spiritualité rosminienne
[1] Nous renvoyons au titre de l'ouvrage de L. Lallemant
(XVI-XVII ième siècle), Doctrine spirituelle.
[2] Jean Bottéro, La naissance de Dieu, la Bible
et l'historien, Gallimard, Folio, Histoire, n° 49, 1992.
[3] Idem, pp. 54-55 : Moïse entend une divinité
inconnue lui révéler son nom : Yahvé, qui signifie en vieil hébreu : Il est,
du verbe "exister, "être". Moïse fait ainsi l'expérience du "caractère à la fois unique et
mystérieux de ce Dieu, duquel tout ce que l'on pouvait et devait savoir, c'est
qu'Il existait, qu'Il était là", et Bottéro ajoute que se
trouve ici "une conception remarquablement profonde : toute l'histoire
religieuse d'Israël, et la nôtre à la suite, s'y trouve en germe, et il faudra
des siècles… pour en expliciter les richesses ." Soulignons alors ici
l'importance de la signification de ce nom, qui, dès les premiers échanges de
l'homme avec son Dieu, désigne à la fois la dimension personnelle et la
dimension existentielle, deux notions fondamentales sur lesquelles repose l'essentiel de la spiritualité catholique,
nous y reviendrons plus loin.
[4] Paul Schebesta, Le sens religieux des primitifs, Mame,
1963. Cette idée est d'ailleurs constante chez des penseurs ou anthropologues
agnostiques de Bergson à Éliade ou Levis-Strauss. Voir aussi W. James, L'expérience
religieuse, que cite par ailleurs
R. Otto, Le sacré, Payot, 2001, chap. III, à propos de la
construction de la mythologie grecque :
"… il semble qu'il y ait, dans la conscience humaine de sens d'une
réalité, le sentiment et l'idée de quelque chose qui existe réellement et
objectivement", mais, nuance Otto,
James "est incapable de reconnaître
qu'il y a dans l'esprit lui-même des dispositions cognitives et des principes
générateurs d'idées". Otto quant à lui développera l'idée que l'homme
perçoit cet invisible au moyen d'un sentiment particulier, le "sentiment
d'un objet numineux", dont on découvre la présence dans la conscience, de
façon extraordinaire, comme chez Abraham, Eckhart ou Tersteegen, et qui est une
force qui met l'âme en mouvement pour tenter d'approcher l'idée mystique de
Dieu, qu' il nomme aussi le "Tout Autre", (idem, chap. IV) en se référant à l'idée de l'anyad-evaI
d'une ancienne Upanishhad, comme l'explique A. Jundt, dans sa préface de la
trad. de R. Otto, op. cit., souligne que "ce pressentiment n'est
autre chose que l'anamesis platonicienne
de l'idée" . Voir enfin, sur le rapport de la foi et de la pensée, Paul
Rostenne, Homo religiosus ou l'homme vertical, B.P.C., Essais-6, éd.
Bière, 1993 et en particulier, chap. III, : "La condition vocationnelle de
l'homme : homo religiosus", p. 59.
[5] M. - M. Davy, L'homme
intérieur et ses métamorphoses, Desclée, Paris, 1987.
[6] A la vérité, ce n'est pas le seul événement de cette
nature que rapporte la Bible : l'on pense, entre autre, à Moïse, conduisant son
troupeau dans les montagnes du Sinaï,
aveuglé par un buisson ardent, qui fut le mode de manifestation de Dieu,
qui l'initie ensuite avant de lui confier sa mission. La théophanie est
longuement commentée par Grégoire de Nysse, (Grégoire de Nysse, La vie de
Moïse, Cerf, 2007) qui explique comment Moïse, avant son envoi en mission,
dût purifier son esprit et recevoir les célestes enseignements, pendant la
durée symbolique de "quarante jours et quarante nuits".
[7] Nous empruntons cette expression à Jeanne
Ancelet-Hustache, traductrice et spécialiste de Maître Eckhart.
[8] R. Gélibert, Philosophie de la croyance, Thèse de
l'univ. Parix X, 1978, sous presse aux Éd. Bière, B.P.C., coll. Essais 11.
Ouvrage indispensable à la compréhension de la notion de croyance, comme
illusion de la connaissance qui entrave l'esprit.
[9] F. Prat, S. J., La théologie de saint Paul,
Beauchesne, 38° éd. Paris, 1949. Prat évoque la difficulté des exégètes à
s'accorder sur le sens précis du mot "esprit" chez Paul, qui utilise
le mot dans trois acceptions : la première désigne "le principe pensant
dans l'homme", la seconde, "l'activité de l'Esprit Saint en
l'homme", et la troisième, "la personne même du saint Esprit".
En réalité, ajoute Prat, cet usage du même mot " n'affecte que rarement le
sens de la phrase".
[10] B. Besnier, Encycl. Phil. Univ., Notions,
"Esprit", T. I, 1990, p. 863. Précisons que la loi ancienne ne
saurait tomber dans la caricature pharisaïque que véhicule encore Badiou à
propos de Paul et qu'a si justement dénoncé Michael Sebban.
[11] J.-M. Trigeaud, "Au risque de renaître", préf.
de la trad. fr. de l'Introduction à
l a philosophie de Rosmini, éd. Bière, B.P.C., coll. Classiques 1, 1992, p.
18.
[12] Voir J.-M. Trigeaud, op. cit., 15, "
La Révélation intérieure" : "Théologiquement, tout le sens de
l'incarnation du logos qui s'annonce comme "l'être", "la vérité
et la vie", se joue et se vérifie par superposition d'un autre type de
connaissance qui découvre une réalité supra-naturelle. Et si elle fait appel à
une autre lumière que celle de l'idée de l'être dans l'esprit, cette lumière,
elle-même intérieure mais supra-naturelle, qui fait connaître le Verbe
comme être le plus complet, n'est pas assimilable à l'être de ce Verbe en tant
que subsistant. Elle constitue une révélation supérieure, pour le chrétien, qui
parachève la révélation profane de l'esprit tourné vers les vérités naturelles
issues de la vérité de l'être, et qui pousse à son accomplissement l'exigence
métaphysique de connaissance inhérente à l'esprit. Mais même si ce qu'elle
enseigne est la Vérité du Verbe en son intégralité et sa plénitude ontologique,
elle n'opère aucune identification à lui ; elle en laisse la connaissance du
tréfonds, de l'hypostase et de la paternité pareillement énigmatique, car elle
est encore "idée", et l'idée est prolongée dans une objectivité
indéterminée. … La présence christique permettra ainsi de fixer le degré ultime
de cette connaissance, par une révélation extérieure, qui réitère celle
du Sinaï et qui retentit dans la prédication évangélique".
[13] F. Prat, idem.
[14] J.-M. Trigeaud, op.
cit. : "N'est-ce pas d'ailleurs le Christianisme qui a restauré cette
faculté de réflexion et d'idéation de l'homme, et ce pouvoir de jugement
critique qui n'a eu avant lui, pour seul équivalent, que la philosophie
platonicienne? N'est-ce pas lui qui enseigne une même vérité à rechercher selon
une démarche naturelle et spontanée de l'esprit, et qui, parvenue au plan
éthique, à celui d'une sagesse qui couronne l'activité philosophique, conclut
que cultiver cette vérité est la valeur suprême?", p.17.
[15] R. Gélibert, op. cit.
[16] Idem.
[17] J.-A. Cuttat
[18] Voir sur cette question Roger Parisot, La doctrine du pur amour, Agora Pocket, 2008, introduction, P. 23.